Promoteurs, constructeurs : des astuces pour livrer parfaitement la copropriété!
Construire un immeuble, livrer, et voir les clients emménager avec le sourire. Voila là le rêve de tout promoteur. La tentation de cette sensation peut mener à omettre certains petits détails qui, quelques temps après, pourrait causer des soucis en terme de finition. Pourtant, hormis le caractère organisationnel qui est bénéfique à la réussite du projet, certaines démarches sont rendues obligatoires par la loi sur la copropriété sénégalaise. Quel est le point de départ de la copropriété? Quels sont les documents à prévoir? Comment faut-il livrer le bâtiment ? Comment assurer la pérennité de l’immeuble ? Je livre quelques conseils à travers cet article.
Départ de la copropriété
Il y a copropriété, lorsqu’un bien, une propriété, appartient à deux personnes ou plus. Cela signifie donc qu’à partir du moment où le promoteur a réalisé sa première vente, la copropriété est régulièrement formée. D’office. Le syndicat des copropriétaires, l’organe qui est constitué de tous les copropriétaires, est créé systématiquement. Ses membres n’ont aucune démarche à faire. L’adhésion est faite de manière automatique. La vente du premier lot constitue donc concrètement la date de départ formelle de la copropriété. A ce titre, rappelons que dans le cadre d’une copropriété dont les bâtiments sont livrés à des dates différentes, les derniers acquéreurs adhèrent au syndicat par défaut.
Ainsi, le promoteur ou le constructeur n’est plus en droit de prendre des décisions liées à l’immeuble de manière unilatérale (même s’il n’y a qu’une seule vente). L’édifice existant ne lui appartient plus, malgré qu’il détienne encore une plus grande majorité des voix. D’ailleurs, tout changement sur le plan de base du projet devra être validée dans le cadre d’une assemblée générale régulièrement convoquée. Parallèlement à cette “association”, le promoteur est censé avoir produit et communiqué en amont toutes les informations concernant la copropriété nouvellement née : le règlement (même si ce dernier n’est pas encore enregistré aux livres fonciers), l’état descriptif de division des lots, la nature et le montant des charges périodiques prévus, la désignation du gestionnaire, entre autres.
Communiquer le règlement de copropriété dans les temps : une obligation
Au Sénégal, le législateur a rendu obligatoire la remise à l’acquéreur du règlement de copropriété en annexe à l’acte de vente. L’article 4 du décret du 15 février 2002 énonce d’ailleurs que les actes qui constatent la mutation doivent mentionner que le règlement de copropriété a été porté à la connaissance de l’acquéreur. Sa remise au client est donc obligatoire au plus tard le jour de la signature de l’acte. Il est à rédiger même en cas de vente sur plan plus communément appelé VEFA (vente en l’état futur d’achèvement).
Hormis l’obligation légale, le promoteur à tout intérêt à divulguer le règlement de copropriété dans les temps. Le principal soucis est lié à la méconnaissance des règles dans la réalisation de certaines actions de la part des résidents : travaux dans un appartement sans avoir sollicité l’autorisation du gestionnaire (syndic), causant la plupart du temps des désagréments parfois non négligeables (infiltrations, fragilisation de la dalle, tuyaux encastrés touchés, … défauts souvent d’ailleurs imputés au promoteur, parfois à tort), travaux hors des horaires autorisés, nuisance sonore, etc. Le document comportera ainsi une rubrique destiné à réglementer ces cas de figure.
Les obligations financières au cours de la vie de l’immeuble
Une copropriété, pour qu’elle fonctionne convenablement, nécessite des rentrées financières destinées à régler les charges : le salaire du gardien, du concierge, des prestations d’entretien (ménage, ascenseur, piscine, …), curage des regards, etc. Le financement est tout naturellement assuré par les copropriétaires à travers des appels de fonds émis par le syndic. C’est le règlement de copropriété qui définit clairement le mode de répartition des charges entre ces derniers, à travers l’état descriptif de division. Le promoteur devra apporter une importance particulière à la communication et à l’explication de cette information. Il préparera, en collaboration avec un syndic professionnel, un budget prévisionnel annuel, accompagné de la répartition sur chaque lot.
A minima, le budget comportera les éléments ci-dessous :
- le montant du contrat d’entretien ménagers (avec un prestataire sérieux et professionnel)
- le montant du contrat de maintenance des ascenseurs, groupe électrogène, piscine (s’il y en a – de préférence avec des structures qui disposent d’une assurance responsabilité civile qui indemniserait les copropriétaires en cas d’erreurs ou de fausses manipulations à l’origine d’un équipement hors d’état de fonctionnement)
- les coûts d’entretien et de curage des regards et des canalisations (source de mauvaises odeurs dans les appartements si non entretenus)
- le montant de la prime d’assurance de l’immeuble. L’assurance couvrira au moins le dommage causé aux tiers. A titre d’exemple : un visiteur qui glisse dans l’enceinte de la résidence et se fracture la jambe, pourrait attaquer la résidence pour défaut d’entretien (si c’est avéré). Dans ce cas de figure l’assurance prendra en charge les frais d’indemnisation et l’assistance juridique. L’assurance couvrira également l’incendie, le dégât des eaux ayant sa source dans les parties communes, les dégâts électriques également. L’assurance n’est donc pas une option, mais une nécessité majeure. En effet, un accident étant par défaut imprévisible, il serait dommage pour le copropriétaire d’investir plusieurs dizaines de millions dans un appartement, pour tout perdre du jour au lendemain à cause d’un malheureux accident.
- le coût lié à l’entretien des équipements de plomberie (réservoir, flotteur, surpresseur, …) servant à se prémunir de toutes pannes susceptibles de créer une rupture d’eau.
- Le salaire du gardien et/ou du concierge
- Les honoraires de gestion du syndic
- …
Les montants ainsi définis devront être communiqués à chaque copropriétaire avant même la remise des clés.
Mise en place du syndic en amont …
Le syndic est l’organe chargé de la gestion de la copropriété en général, avec une mission première : l’entretien et la conservation des parties communes et des équipements collectifs. Un métier à part entière qui nécessite connaissance juridique et administrative de l’environnement de la copropriété, mais également connaissance en technique du bâtiment. En outre, le syndic est chargé de l’application du règlement de copropriété. Il s’occupe également de la gestion financière, de la comptabilité, notamment du recouvrement auprès de chaque copropriétaire.
La mise en place du syndic est obligatoire dès la constitution de la copropriété. En règle générale, il est recommandé de nommer un syndic provisoire avant les premières ventes. A ce moment, professionnel averti sur les besoins nécessaires à une gestion sérieuse, il sera à même de pouvoir anticiper sur les éventuelles charges à prévoir. Les postes de charges ainsi créés vont constituer le budget prévisionnel généralement estimé sur une base annuelle, et qui sera réparti entre tous les copropriétaires en fonction des millièmes de copropriété. Le syndic provisoire organisera la réception des parties communes avec le promoteur. Cette réception constituera d’ailleurs la date de départ de la garantie de parfait achèvement (ou garantie biennale). Durant une période de deux ans, le constructeur pourra être appelé en réparation pour tout défaut constaté sur les équipements collectifs.
Quid des compteurs d’eau et d’électricité
Notons que l’organisme fournisseur d’eau installe toujours un compteur général par lequel transite tous les compteurs individuels de la copropriété. Pour l’electricité, c’est le compteur général qui alimente tous les équipements collectifs (ascenseur, pompe de relevage, …) mais également l’éclairage des parties communes (cage d’escaliers, couloirs, etc.). Il génère donc une consommation qui doit être supportée par les copropriétaires. En cas de suspension, c’est tout naturellement tous les appartements qui seront suspendus, peu importe qu’ils aient réglés individuellement leur facture ou pas. L’aspect compteur général doit donc être pris au sérieux.
Les compteurs généraux sont installés sur demande du promoteur. Les demandes devront être faites bien à l’avance, avant même la remise des clés. La plupart du temps, le traitement par la société de fourniture d’eau peut prendre plusieurs semaines voire des mois. Le promoteur devra indiquer en même temps le nombre de lots à équiper éventuellement en compteur individuel. Une convention lui sera remise, qu’il devra à son tour communiquer à tous les copropriétaires. Ces derniers se rendront à leur tour avec le document remis pour satisfaire à leur démarche d’abonnement.
Il arrive de voir certains promoteurs prendre en charge les dépenses de consommation d’eau des résidents, pendant une certaine période. Quelques fois pour combler le retard administratif qui leur est imputable, parfois pour des raisons commerciales dans le but de satisfaire au mieux. Geste à saluer ou pas, il est à retenir que le retard de délivrance de la convention peut causer quelques soucis : problème de ventilation de la facture d’eau du compteur général notamment la méthode de calcul pour laquelle il n’y a pas de règle prédéfinie, problème de surconsommation également.
Une attention particulière devra être portée à l’installation des compteurs électriques qui devront être logés au sein d’un local impérativement fermé. D’abord pour des raisons évidentes de sécurité, mais aussi pour éviter les branchements sauvages qui peuvent causer d’énormes dégâts (la première cause d’incendie dans les bâtiments est d’origine électrique).
Le syndic est un métier à part entière et sa participation dès la phase de conception du projet serait d’une grande utilité pour le promoteur et ses futurs acquéreurs. Des questions à savoir où faut-il installer le local poubelle, quelle doit être sa capacité, quelles clés de répartition prévoir dans le règlement de copropriété, qui doit cotiser combien et sur quel type de prestation (les appartements du rez de chaussée doivent-il participer sur les travaux de réparation de l’ascenseur), quel budget prévoir, … autant de questions qui doivent être abordées avant même la pose de la première pierre.
La durabilité d’un programme immobilier en copropriété et le maintien de sa fraîcheur dépend pour beaucoup de sa gestion. Sa pérennité est aussi une belle carte de visite pour le promoteur vis à vis de ses futurs projets immobiliers. La beauté de l’architecture d’un bâtiment compte dans l’appréciation de la qualité de l’édifice livré. Par ailleurs, lorsque la transition et le transfert de responsabilité du promoteur au client sont moins bien maîtrisés, cela entachera naturellement l’image du promoteur qui en règle générale, sera à tort ou à raison considéré comme le responsable.